La Colombie, nouveau fournisseur de cannabis thérapeutique

La Colombie enfin en paix après l’accord signé par les FARC la semaine dernière veut promouvoir la culture du cannabis à usage thérapeutique pour développer les campagnes dévastées par trente ans de guerre civile. Une première licence a été accordée pour produire sur place les dérivés de la marijuana.

Longtemps entachée d’une mauvaise réputation à cause des barons de la drogue qui régnaient sur le trafic de la coca, la Colombie se lance très sérieusement dans la filière du haschich à vocation pharmaceutique. La marijuana est de plus en plus utilisée dans les traitements du cancer, de l’épilepsie et des scléroses. Cette semaine à Bogota une première licence a été accordée pour autoriser la filiale colombienne de la société canadienne Pharma Cielo à transformer la plante sur place – son exportation brute est pour l’instant interdite.

Six autres demandes de licence sont en attente sur le bureau du ministre de la Santé. C’est une révolution que le gouvernement est en train d’accomplir qu’il s’est donné les moyens de réussir en se dotant d’un cadre juridique favorable aux affaires, et assez strict pour éviter que le produit ne soit détourné vers le trafic illicite.

La production du cannabis est-elle l’avenir de la Colombie ?

C’est une industrie naissante, c’est donc le bon moment de se lancer dans la course. 14 pays ont déjà des législations autorisant l’importation de cannabis à usage thérapeutique (dont les États-Unis, le Canada, l’Espagne, les Pays-Bas et l’Allemagne). La demande est en plein essor et l’offre est en train de se mettre en place. La Colombie a de sérieux atouts pour devenir un producteur de premier plan : un climat tropical favorable. Une expertise agronomique en la matière.

Parce que dans les années 1970 les paysans des zones côtières plantaient du cannabis destiné à la contrebande, déjà pour le marché américain, mais ils sont vite passés à la coca plus lucrative, ils pourraient donc aujourd’hui renouer avec une culture que leurs pères connaissent bien. Enfin, la main d’oeuvre est ici bien meilleur marché qu’aux États-Unis et au Canada, les deux pays les plus en pointe dans cette filière de la drogue légale.

Le gouvernement compte sur cette filière pour fournir des emplois aux anciens combattants des FARC

La culture du cannabis s’est développée de manière illégale dans les zones contrôlées par la guérilla. C’est donc un gisement naturel d’emplois pour les démobiliser dans ces provinces. Notamment dans le sud-ouest, autour de Popayan une ville surtout connue pour son excellent café arabica récolté dans les environs.

Cette industrie naissante est une opportunité, mais elle ne résoudra pas tous les problèmes économiques provoqués par la guerre civile. Des millions de paysans ont été privés de leur terre et ils demandent aujourd’hui réparation à l’État. Il faut donc que ces réparations soient rapidement mises en oeuvre pour que la culture du cannabis devienne une activité profitable à tous les niveaux de la société.

La Colombie a une économie dynamique, mais c’est aussi l’une des plus inégalitaires de l’Amérique latine

À cause de la guerre, de la faillite de l’État absent d’une partie du pays pendant des décennies, certaines régions sont en déshérence, manifestement sous-développées. Faire de la croissance partagée, c’est le principal défi que doit maintenant relever le gouvernement. Grâce surtout au pétrole qui représente la moitié de ses exportations, la Colombie a connu une croissance très forte pendant dix ans.

Malgré la chute des matières premières, elle demeure positive et la Colombie est encore un îlot de prospérité entouré de pays en récession, du Venezuela en pleine crise à l’Argentine ou au Brésil. Il lui faut maintenant se diversifier. Le cannabis fait partie des pistes prometteuses comme les nouvelles technologies en plein boum à Medellín.

Source : www.rfi.fr

Auteur: Philippe Sérié

Partager cet article :