Témoignage Thierry

Descriptif de ma maladie :

Atteint d’une maladie de Crohn depuis quatorze ans, j’ai tout d’abord testé la plupart des traitements allopathiques allant de la corticothérapie au Pentasa et autre Méthotréxate. Les choses se sont compliquées à la cinquième année avec une thrombopénie périphérique idiopathique qui a répété des taux morbides de plaquettes à 1000/mm3. Finalement, à la faveur d’un taux plus élevé, une splénectomie (ablation de la rate) a été effectuée. Il faut croire qu’en médecine, lorsqu’on patine dans l’ignorance, on coupe les symptômes sans s’attarder à comprendre les causes !!!!!

Dans la foulée, constat d’une évolution inflammatoire nécrotique de crohn et sans autre proposition thérapeutique, j’ai entamé un parcours chirurgical pour le moins copieux. Colectomie subtotale, pose d’une iléostomie pendant un an puis reconnexion intestinale. Echec de l’anastomose avec occlusion, donc cette fois colectomie totale avec reconstruction d’un réservoir. Je passe les péripéties hospitalières ubuesques truffées d’erreurs professionnelles allant jusqu’à me conduire en service de réanimation.

 

Voilà donc le profil pathologique posé pour une maladie chronique inflammatoire auto-immune dont on ne connait pas vraiment les facteurs déclenchant et ne guérissant jamais. Au pire il peut y avoir une évolution sur la totalité du système digestif, langue comprise et au mieux l’espérance de périodes de rémission.

 

Pourquoi le cannabis thérapeutique ?

 

Tant que c’est possible, j’ai choisi de ne pas entrer dans les protocoles chimiques qui se sont soldés par des inefficacités. Il va de soi que cette démarche est personnelle et en aucun cas je prône ici le rejet des schémas classiques de soins. J’y ai parfois trouvé des issues salvatrices aux pires moments de la maladie, en particulier par les corticothérapies ponctuelles sous perfusions. Cependant pour les traitements au long cours, signes psychosomatiques de blocages, d’aprioris, ou pas vis-à-vis de l’allopathie, il se trouve que je déclare la quasi-totalité des effets secondaires délétères inscrits sur les notices de médicaments et je peux même en inventer.

Avec une aversion, sans jeu de mot, intestinale envers les hôpitaux, j’ai cessé tout traitement et consultation pendant quelques années jusqu’à une rechute sévère inévitable et donc bien obligé de retourner dans le système. Alors on remet le couvert avec des traitements déjà utilisés et inefficaces. Finalement, mise en place d’un joyeux compagnon chimique qui est à l’origine dédié au traitement contre la leucémie. A faible dose contre crohn, des résultats positifs sont observés, mais comme dans la plupart des traitements chimiques, les effets secondaires ne sont pas anodins. Alors relation de cause à effets ou pas, en ce qui me concerne, au bout de quelques semaines je me suis retrouvé hospitalisé avec 40 de fièvre pendant dix jours.

Après cela, face à mes réticences pour réinstaller le même produit, il faut se battre contre les médecins qui vous font la morale sur l’urgente nécessité de prendre un traitement avec une insistance intrusive, une pédagogie de taupe et une vision thérapeutique « pharmaco-maniaque » ! Je ne peux toutefois pas leur reprocher, vu qu’ils n’ont appris que cela (sauf la pédagogie) mais je déplore cette obstination étriquée lorsque confronté à des échecs répétés, il faudrait alors élargir le champ de réflexion.

Puisque le corps médical français est menotté chimiquement et parfois stérile de curiosité thérapeutique, je cherche d’autres alternatives, alors vive internet où je déniche une foultitude d’articles de recherches scientifiques. Moi qui n’ai jamais côtoyé une once de verdure cannabique ou inhalé de fumée du même genre en un demi-siècle d’existence, je découvre les différentes applications thérapeutiques du cannabis. J’apprends que l’homo sapiens-sapiens a naturellement des récepteurs de cannabinoïdes identifiés au début des années 90 et nommés CB1 et CB2. Le premier se trouve principalement dans le système nerveux central et le second dans certaines parties du système immunitaire dont la rate. Ha tiens, je remercie les érudits médicaux d’avoir décidé de l’enlever, mais passons !!

Je lis qu’environ 75 types de cannabinoïdes sont connus, répartis dans plusieurs groupes de structures chimiques de bases. Il y a le fameux delta-9 THC qui attise les débats avec ses effets psycho-actifs, mais il y a les autres, dont le CBD (cannabidiol). Ce composant agit au cœur du système défensif par une plus grande affinité avec les récepteurs humains CB2 qui sont placés sur les cellules immunitaires T. Ces dernières, nommément TNF-alpha sont d’ailleurs la cible de certains traitements allopathiques récents (anti TNF) pour modérer et contrôler leur production excessive qui entre dans le processus inflammatoire de la maladie. Pour terminer, CBD semble réduire la modification de l’activité mentale générée par le THC qui a la même structure moléculaire brute que CBD (isomère). La boucle est bouclée, il faut que j’essaie !!!

 

Premiers contacts avec les cannabinoïdes :

 

Ancien fumeur, je crains cette addiction dont les messages ne manquent pas d’en bombarder les risques et ne veux pas replonger dans une dépendance intolérable. Mais la maladie oppressante et son cortège de douleurs m’obligent à franchir le pas, alors, non sans réticences, je teste les premières « cigarettes » cannabiques de ma vie et fais le choix du produit pur sans adjonction de tabac.

Après plusieurs jours où je ne prends que quelques bouffées le soir, le constat quotidien de l’efficacité sur la douleur est sans appel, indéniable, implacable, prodigieux, tant l’échelle de souffrance vole en éclat après quelques minutes suivant la prise, passant d’une intensité de 6 sur 10 à quasiment rien. Quel repos pour l’esprit et le corps de pouvoir renouer avec des périodes apaisées, sans les coups de dagues perpétuels venant transpercer l’abdomen. Jamais au cours de mon cursus de malade, pas une seule fois je n’ai connu pareille diminution, voire disparition de la douleur, même pas à l’hôpital sous pompe à morphine qui me faisait plus dégueuler qu’autre chose.

Par contre, n’utilisant pour l’instant que du produit à dominance THC je découvre les fameux effets psycho actifs et j’avoue que c’est déstabilisant, voir désagréable de constater l’effilochage de certaines facultés cognitives. Même si au fil des soirées, cette altération de la cognition peut être tolérée au regard de l’efficience sur la douleur, j’ai un peu de mal à l’accepter. Il faut donc trouver d’autres solutions et elles commencent à exister par la sélection de plantes ou la recherche d’un taux de CBD élevé est le critère prépondérant. Parmi les centaines de variétés existantes très peu d’élues disponibles, mais finalement quelques unes avec un pourcentage égal, voire supérieur au THC, sachant que celui-ci doit aussi rester présent pour ses vertus thérapeutiques. Le tout est de trouver l’équilibre du ratio interactif THC/CBD pour un ciblage spécifique sur le système immunitaire, moteur de crohn, juguler la douleur qui s’emballe parfois dans des montées vertigineuses et diminuer, ou si possible faire disparaitre les effets psycho actifs.

Même si la solution facile et pratique de fumer génère une réponse positive quasi immédiate sur la douleur, le problème reste entier, alors il me faut trouver une alternative.

 

Ma méthode de consommation :

 

Les cannabinoïdes sont lipophiles, donc solubles dans un corps gras, alors je choisi le lait d’amande et commence à expérimenter la décoction. Celle-ci est préférable à l’infusion car la lente montée en température extrait plus facilement les principes actifs du matériel végétal.

Au fil du temps et après différents tests, le dosage est de 2 grammes de végétal pour un litre de lait. La première chauffe est effectuée 24 heures avant la consommation. Une pause au réfrigérateur après refroidissement lent et un réchauffage chaque soir pour consommer une tasse de 20cl. Avec ce procédé, les effets sont d’abord différents car les principes actifs ne passent pas dans le sang directement comme lors d’une prise par inhalation. Il faut le temps que le produit, arrivé dans l’estomac, se diffuse au travers des tissus, donc les sensations sont graduelles. Il n’y a pas cette action immédiate qui coupe la douleur, mais une diminution de celle-ci qui ne cesse au fil des minutes. Il ne faut pas moins d’une heure pour arriver quasiment au même résultat qu’en fumant, mais la différence remarquable est la persistance d’action. Ne prenant jamais plus de cinq bouffées lorsque je fumais, les effets duraient au maximum quatre heures, mais par ingestion de 20cl de décoction, l’impact est au minimum doublé dans le temps, alors la conséquence est de taille. Tout simplement redécouvrir une nuit complète de sommeil où la place est laissée au repos et non plus aux flashs de douleurs qui vous sortent du lit et consomment l’énergie nécessaire pour le lendemain.

 

La chronologie passée de mon approche du cannabis thérapeutique étant maintenant établie, j’ai à ce jour de témoignage un peu plus d’une année de recul. Rien à ajouter sur la douleur tellement les mots sont faibles pour définir l’efficacité redoutable des cannabinoïdes. J’ai choisi de consommer la décoction une fois par jour, le soir, pour des nuits apaisées, ce qui me permet de mieux gérer psychologiquement la douleur dans la journée. Je conserve cependant, à titre exceptionnel, l’utilisation de quelques inhalations lorsque la douleur atteint un seuil plus difficile à tolérer.

 

Suis-je devenu dépendant ?

 

Alors moi ancien fumeur, suis-je redevenu dépendant avec une consommation quotidienne au début du traitement, puis maintenant de façon tout à fait sporadique ? Hé bien n’en déplaise à tous ceux qui claironnent la servitude cannabique, soit disant spécialistes ou pas, il n’en est absolument rien !! J’en suis le premier surpris, mais l’explication viendrait du fait que je ne mélange pas avec du tabac, comme la majorité, si ce n’est la quasi totalité des consommateurs qui en ajoute pour faciliter la combustion.

L’idée généralement retenue sur la dépendance est la libération de la dopamine qui active le système de récompense dans une dynamique de plaisir, alors de nombreuses recherches se cantonnent et s’obstinent à prouver ce processus, en incluant le cannabis parmi les produits générant le phénomène. Il y a heureusement des chercheurs curieux qui regardent derrière les portes fermées comme, entre autres, le neurobiologiste Jean Pol Tassin qui explique l’implication de deux autres neurotransmetteurs, la noradrénaline et la sérotonine. C’est l’histoire d’un découplage qui remet en cause les idées reçues, ou le cannabis ne déclenche pas le système addictif et que dire du chapitre sur la nicotine. Tout cela bouscule des certitudes servant pourtant de références à des décideurs qui feraient bien d’élargir leurs lectures, notamment sur le lien : « //lettre-cdf.revues.org/283 » et la très intéressante démonstration sur les mécanismes de la dépendance «www.universcience.tv/video-l-addiction-4937.html ».

Non, le cannabis thérapeutique pur ne déclenche pas d’addiction et je fais parti de la preuve !!!

 

Effets psycho-actifs :

 

Qu’en est-il maintenant des effets psycho-actifs pour lesquels je n’avais vraiment pas de sympathie ? Dans la mesure du possible, je prends des décoctions de produit à dominance de cannabidiol et dans ces conditions aucune altération des perceptions. Il y a juste une sensation de (bonne) fatigue lucide, comme celle pouvant survenir après une journée d’intenses activités.

 

Mes constats sur la maladie :

 

Alors aujourd’hui, quelle incidence sur crohn après avoir mis en place une consommation de cannabis thérapeutique depuis plus d’un an ?

Tout d’abord, absence des symptômes toxiques subordonnés aux médicaments et ce n’est déjà pas une mince affaire sur la qualité de vie.

La maladie exprime toujours ses fluctuations « d’humeur », mais les phases aigues n’ont pas atteint les intensités qui me propulsaient directement à l’hôpital.

Le fait d’accéder à des périodes de sommeil reposantes a un retentissement positif sur la vie quotidienne certes personnelle, mais aussi sur l’entourage. Un père/compagnon moins souffrant = des enfants et une compagne plus rayonnants Ce n’est pas rien car si le premier message que j’ai reçu des spécialistes annonçant cette pathologie est « malade à vie », le second est l’observation significative d’éclatements familiaux et séparations.

Il y a sans nul doute aussi un impact sur l’appétit, conditionné par des sensations de faim, mais gaffe aux vives envies de sucreries qui piquent les papilles au fur et à mesure que la décoction se diffuse !

J’observe une souplesse abdominale avec presque une disparition des ballonnements durcissant le ventre.

Avec une colectomie totale, le sens giratoire de la vie se voit imposer de toujours repérer s’il y a un panneau « toilettes » dans l’environnement des déplacements. C’est une des contraintes pour cette maladie qui se voit tout de même décerner une carte de priorité pour personnes handicapées, notamment dans les files d’attentes. Depuis la prise de cannabinoïdes, les passages fréquents et impérieux sur le trône ont notablement diminué !!

Le dernier aspect constaté s’affiche lors des prises de sang avec le dosage de la CRP, la protéine C réactive étant un indicateur inflammatoire. Les niveaux ont généralement diminué dans les phases plus aigues et atteignent un dosage proche de la normale aux périodes « apaisées ».

 

Avec seulement une année d’utilisation du cannabis thérapeutique, je vis globalement mieux une maladie qui a radicalement transformer mon existence et peut vous enfermer dans un isolement sociétal, un quotidien de douleur et autres contraintes invalidantes. Le plus étonnant est cette fulgurance antalgique, alors je dirais que s’il y a un soupçon d’addiction dans cette démarche, c’est celle de retrouver chaque soir un apaisement, de la tête, du corps et des nuits, qui changent les lendemains.

 

Sans repères scientifiques autres que des recherches venant de l’étranger et surtout sans possibilité d’accompagnement en France, c’est un frein considérable pour la connaissance et l’installation pérenne d’un protocole de soins cannabique unique ou complémentaire. Rien que pour crohn, 120 000 personnes sont concernées en France et la progression est en continuelle augmentation avec chaque année 4 à 5 nouveaux cas pour 100 000 personnes (source AFA). Je dois donc continuer de tâtonner pour trouver les conditions optimales afin de contenir ma maladie…………, ou déménager hors de ce pays, vers des destinations de plus en plus nombreuses qui cherchent, trouvent, développent et vont jusqu’à légaliser l’utilisation d’une plante aux multiples vertus médicales (et autres).

 

Librement malade, mais prisonnier du système de soins !

 

Même en liant intimement « médical », prononcer cannabis revient à faire une alerte à la bombe. La majorité des acteurs politiques et de santé paniquent et se réfugient derrière un dogmatisme collectif poussiéreux et préconçu. Pourtant, aux primaires socialistes, F. Hollande propose une réflexion à l’échelle européenne avec une commission d’expert sur les soins et même aussi sur la dépénalisation du cannabis Hollande et cannabis. lepoint.fr 06/06/2011, mais clac, la porte se ferme lorsqu’il devient candidat pour la présidentielle.

Ici, il n’est question que de se soigner et pas autre chose, alors ministres, députés, sénateurs et autres acteurs décisionnels, décoincez vous de vos pupitres et réveillez vous, ou plutôt non, EVEILLEZ VOUS !!

Allez-vous rester à la traine de nombreux autres pays qui reconsidèrent la législation sur le cannabis en détricotant les restrictions ?

Allez-vous continuer de ne pas voir cette accélération d’accès aux soins cannabiques qui gagne de plus en plus de pays et états des USA ?

Allez-vous encore ignorer et refuser les nombreuses recherches montrant des découvertes probantes d’efficacités sur différentes pathologies ?

Allez-vous persister pour un système de soin unilatéral, sans y adjoindre un pragmatisme alternatif que certains malades ont eux, par nécessité impérieuse, mis en place ?

Allez-vous toujours les snober ces malades qui ont l’audace d’entreprendre des démarches thérapeutiques complémentaires pour mieux vivre au quotidien ?

Allez-vous, vous, en exprimer de l’audace, ou comme suggérait Dominique Vaillant, à propos de la législation sur le cannabis, « avoir un peu de courage » ?

 

Au-delà du courage, ce serait finalement plutôt un devoir vis-à-vis de son peuple et, de grâce, ne me faites pas le coup d’une évolution significative avec l’exemple du sativex, même si on peut nourrir de ténus espoirs avec son arrivée en France pour 2015.

En effet, les motivations de mise sur le marché ne sont pas celles d’un pays voulant innover, mais qui plie l’échine devant des directives européennes, suite aux pressions exercées par la firme pharmaceutique GW-Pharmaceuticals qui distribue sativex. D’autre part, en prenant connaissance des conditions restrictives d’attribution de ce médicament (voir sur ce site), je ne peux faire qu’un constat de paralysie politique.

L’état n’arrête pas de mettre en lumière l’innovation et la recherche comme un des moteurs de la croissance, comme encore lors d’une conférence à Strasbourg du 30/01/14 ou F. Hollande intervient derrière un pupitre estampillé : « la recherche, un investissement d’avenir ». Des études sur les cannabinoïdes thérapeutiques pourraient être un secteur porteur de cet d’avenir, avec une réaction positive en cascade sur la santé, l’économie et l’emploi. Mais non, apparemment ça ne convainc pas.

 

Parenthèse édifiante, mais révélatrice à propos d’une carence :

 

Dire « Soins par les plantes » est une insulte pour certains et je me souviens encore de la réaction d’un gastroentérologue à cette évocation, Je cite : « nous avons le savoir scientifique avec des preuves et le reste n’est que suppositions farfelues et infondées ». Voilà qui est dit !!

L’exemple de ma carence en fer est du même ressort que l’histoire du cannabis thérapeutique. Avec crohn et une ablation du colon, l’absorption des nutriments et vitamines peut devenir problématique et suite à des symptômes caractéristiques, une prise de sang montrait une anémie. Alors préconisation d’un médicament genre Fero-Grad par l’érudit gastro et devinez ?! Ca n’a pas trainé, dans la foulée, douleurs abdominales accrues et autres désagréments. Sur la liste d’effets secondaires, je lis notamment « possibilité de troubles gastro-intestinaux à type de nausées, constipation ou diarrhées ».

Incroyable, on me donne un truc qui peut accentuer une dégradation intestinale déjà présente et à la question de savoir s’il existait un autre moyen, réponse négative. Autrement dit, constat d’impuissance et débrouille toi avec ta carence ferrique !!!!

Alors ce que n’a pas su faire le glorieux spécialiste, je l’ai trouvé dans le coin de mon jardin. Depuis que je prends chaque matin une décoction de jeunes pousses d’orties, carence disparue ! Ouf, l’ortie n’est pas encore interdite, mais chuuut, il ne faut pas le dire car on ne sait jamais !!??

Je laisse aux lecteurs les réflexions sur cette parenthèse, tellement révélatrice……

 

Déjà fiché malade invalide, je deviens en plus délinquant :

 

Avec une éducation stricte, voire rigide, sur le respect des règles et des lois, je me vois contraint de franchir des lignes que la justice condamne. Je deviens donc délinquant pour détention et consommation de produits interdits, au même titre que tout dealer.

Le plus difficile est ce risque permanent de voir débarquer képis et uniformes comme l’on déjà vécu nombre de personnes dans la même situation. Aller hop, garde à vue, leçon de morale, tribunal et parfois l’apothéose d’une condamnation absolument délirante et ubuesque, car il faut le voir pour le croire. En effet, avec la confiscation du produit naturel, on retire au malade/délinquant ses possibilités de traiter sa pathologie ou diminuer l’impact délétère d’un traitement allopathique, mais en jugement certains se voient prononcer une injonction de soins, donc d’utilisation unique de produits chimiques. Hallucinant !!!!!!!

 

Juste quelques chiffres :

 

Comme déjà évoqué, non, je ne prône pas le rejet des soins allopathiques, car leur efficience ne fait souvent aucun doute. Cependant, comment ignorer que chaque année en France, environ 18000 décès sont directement liés à la prise de médicaments, avec aussi les fameux scandales d’utilisations détournées dans les préconisations et il y a sans cesse des alertes. La revue médicale « Prescrire » qui décerne habituellement une « pilule d’or » à un médicament aux effets bénéfiques n’a rien attribué depuis cinq ans. Au contraire, c’est une liste de 68 médicaments à éviter qui voit le jour, dont certains, plus dangereux qu’utiles devraient être écartés dans l’intérêt des patients. On peut remarquer notamment les traitements contre Alzheimer qui ont, je cite : « une efficacité minime et transitoire, mais qui peuvent exposer à des effets indésirables graves ». Contre cette maladie, des recherches ont montré que le cannabis agissait favorablement, voir La maladie d’Alzheimer | Principes actifs

L’alcool afficherait 50 000 morts à son actif et le pompon revient au tabac avec le nombre effrayant de 200 défunts par jour. La vente de tabac rapporterait 14 milliards à l’état, mais le cout global sur la santé pour la société est évalué à 47 milliards, mais on continue de distribuer des patchs à la nicotine, alors que celle-ci n’entre pas dans l’addiction (voir lien ci-dessus). Moi, le malade et citoyen d’en bas, j’ai comme l’impression que les choix politiques de soins sont plus conditionnés par des intérêts financiers que par la volonté farouche d’un pays à vouloir apporter à son peuple toutes les conditions nécessaires pour la protection de la santé. Houlà, je crois bien que la fin résonne comme un passage du préambule de la constitution du 27 octobre 1946, non !!?

Face à tous ces chiffres, il y a une complicité de déni sociétal et politique qui refuse de voir les faits. Les mêmes qui fument cigarettes, cigares et s’envoient des rasades d’alcool dans les salons feutrés des instances étatiques dressent vent debout les boucliers contre le cannabis. Alors comment faire entendre que son utilisation THERAPEUTIQUE, testée et approuvée par les malades ne tue pas comme certains produits évoqués, mais soigne et devient donc une nécessité !!

 

Mes conclusions très personnelles :

 

L’interdiction de consommation à fait partie des messages auprès de mes enfants, alors  en scolarité, car il faut être sacrément vigilant en constatant avec effarement la circulation de ce genre de produit (et d’autres encore plus dangereux) dans les établissements scolaires. D’ailleurs, au lieu de taper sur des « malades cannabiques » déjà à genoux, je pense qu’il y aurait mieux à faire dans les enceintes de l’éducation nationale. Mon expérience de consommation déclenchée par la maladie est finalement la seule qui donne des réponses pour un quidam de mon genre et mes conclusions très personnelles sonnent ainsi :

Même si je n’ai qu’une année de recul et doit encore affiner ma méthode, le cannabis thérapeutique est efficace sur ma pathologie et me permet de soulager le quotidien.

Une fois pour toute, il n’y a pas d’addiction en consommation pure de fleurs de cannabis, alors cet argument repris sans cesse est totalement fallacieux !!

Il est important de dire aux jeunes en pleine croissance que le cannabis n’est pas une récréation et qu’il y a une incidence néfaste particulière à consommer pendant toutes ces années décisives pour l’avenir.

Les effets psycho actifs existent avec du produit à fort taux de THC et il est indéniable qu’il y a une dangerosité dans certaines conditions, notamment au volant ou j’ai lu que 230 morts seraient imputables au cannabis dans les accidents de la route chaque année.

Il existe cependant des niveaux de THC réduit comme la variété médicale développée par Tikun Olam en Israël, avec moins de 1% de THC et un taux annoncé de 16,3% de CBD, alors arrêtons de faire peur pour cautionner des interdictions thérapeutiques.

Ceci dit, le THC est aussi important pour certaines affections et la douleur, mais là encore des réponses existent avec notamment la découverte de l’efficacité du delta9 Tétrahydrocannabiorcol agissant comme le paracétamol (néfaste pour le foie) et surtout ne déclenchant pas les récepteurs humains de cannabinoïdes, donc pas de retentissement cognitif, voir CNRS – Sciences biologiques – Parutions . Alors qu’est qu’on attend !!!!!!!!!

La fronde anti cannabis ne fait pas de distinction entre la consommation récréative et thérapeutique et c’est un aveuglement récurent pour le développement du second. Je ne renie pas certains aspects indésirables comme évoqué ci-dessus, mais les recherches montrent qu’ils peuvent être évités et franchement ils me semblent bien pâles à côté des produits licites en vente libre et générateurs de milliers de morts. Que dire du ratio bénéfices/risques employé pour les AMM de médicaments, je crois bien que le cannabis thérapeutique emporterait tous les suffrages de mise à disposition auprès des malades.

Alors non d’un chien il faut sortir de cette torpeur vieillotte qui bloque tout processus d’avenir pour l’accès au CANNABIS MEDICAL !!!

 

Des fois qu’il faille en rajouter un chouia pour convaincre :

 

Un petit supplément concernant une personne de mon entourage atteinte de crohn depuis vingt ans. Celle-ci est stabilisée depuis 2008, mais à cette période une Spondylarthrite ankylosante axiale et périphérique s’est ajoutée, avec évolutivité constante, saccadée en moyenne de trois poussées sévères par an. Autrement dit la personne déguste sévèrement à certaines périodes de douleurs intenses.

Sa démarche de soins est uniquement allopathique avec une liste de produits copieuse : Injection anti TNF alpha, Imurel et Salazopirine pour contenir les deux maladies. Cacit d3 et Fosanax pour pallier à des carences calciques. Jusqu’à peu Klipal 600, mais arrêt suite aux effets secondaires et enfin Acupan dans les périodes de poussées. Ouf, sacré cartable chimique, qui contient crohn mais c’est un peu plus compliqué pour spondylarthrite.

Quoi qu’il en soit, cette personne ne conçoit pas d’autres formes de soins et surtout pas cannabis qui est psychologiquement et déontologiquement impossible (ancienne fumeuse avec craintes de rechute, produit illicite), mais il n’est pas question ici de remettre en cause son choix thérapeutique.

La petite nuance est apparue à la défaveur d’une crise avec douleurs violentes et n’y tenant plus malgré les antalgiques puissants, je lui ai suggéré d’essayer juste une fois et une seule une décoction avec du cannabis non chargé en THC, mais en CBD. Résultat, elle a redécouvert ce qui n’était plus depuis…….., selon ses mots, depuis tellement longtemps qu’elle n’en a pas souvenir. Donc une nuit apaisante où les douleurs ne l’ont pas réveillée à deux heures du matin mais ont attendu l’aube, avec le retentissement positif sur le lendemain.

Non, ça ne vous convainc toujours pas !!??

 

La perle de fin :

 

Parmi les mises en garde contre les effets indésirables du THC, l’académie de médecine cite des risques de dépendance psychique et physique et des interactions médicamenteuses nombreuses et gênantes, notamment avec les benzodiazépines utilisés contre l’anxiété et l’insomnie ainsi qu’avec l’alcool.

Alors là, on verse dans le burlesque absolu, grandiose et atomique. Ces psychotropes ne sont pas moins de vingt deux en vente en France et un français sur cinq a consommé au moins une fois une « benzo-machine » en 2010. Cent dix millions de boites vendues en 2011, soit un remboursement de 210,6 millions d’euros remboursés par l’assurance maladie. Plus de 25 millions de personnes ont côtoyé ce produit entre 2006 et 2011 et depuis vingt ans trois rapports ont alerté les pouvoirs publics sur les risques liés à ces consommations. Attention, je ne conteste pas l’efficacité donnée pour des traitements de courtes durées, mais cela reflète une des problématiques d’utilisation des médicaments chimiques.

Donc alerte académique contre l’interaction THC/Benzodiazépine, alors que si l’on choisi bien la variété de cannabis, pas d’anxiété et insomnie au placard………et je sais de quoi je parle. Quant à la dépendance cannabique, tout a été dit, mais allez voir le lien :

Benzodiazépines : rappel sur le syndrome de sevrage, l’effet rebond et la rechute

Ça vaut tous les discours !!

 

Remerciements et dédicace :

 

Je rends grâce à « canna médical » pour me permettre de vivre un quotidien plus facile avec une maladie incurable. Avec tout ce que j’ai vécu dans les hôpitaux et ailleurs, je préfère vivre mieux avec le cannabis pour ce qui me reste d’existence, même s’il y a soit disant des risques (à prouver), que de subsister dans les conditions du passé.

Je dédie mes craintes de voir un jour les portes du tribunal s’ouvrir pour moi à tous ceux qui pensent que vouloir se soigner avec un traitement considéré à ce jour illicite est tout à fait condamnable. Que feriez-vous dans des conditions similaires ??

J’offre un instant ma souffrance à tous les acteurs décisionnels qui ne me permettent pas d’obtenir sereinement et constamment un produit naturel efficace contre ma pathologie. Juste un instant de douleur, car je ne la souhaite pas aux autres, mais à une intensité de 6/10, je crois bien que nombreux feraient tomber leurs barrières d’interdictions comme je l’ai moi-même fait.

 

Pour terminer, si au cours de ce modeste témoigne il peut être interprété que je suis un peu en colère contre le corps médical, oui j’avoue être un peu remonté. J’ai connu de nombreux hôpitaux provinciaux et parisiens où j’ai vécu des scènes délirantes que même un scénariste ne saurait inventer. Le sommet fut atteint par des conditions de soins post opératoires montrant des carences lourdes de pratiques et manque de professionnalisme, aggravant nettement mon état déjà affaibli par la chirurgie. On ne bricole pas un humain comme on répare une voiture. Pour ceux qui croiraient que j’affabule, la narration de mes péripéties hospitalière en haut lieu a déclenché une enquête dans le « ser-vice » d’où je ne sais pas encore comment j’ai pu en sortir debout.

Cela ne m’empêche pas d’avoir un profond respect pour toutes (ou presque) ces personnes, chirurgiens, médecins, infirmiers(es), aides soignants(es), car franchement les conditions d’exercices des différents métiers sont loin d’être une sinécure……..et j’ai rencontré de vrais personnages impliqués par leur métier et attachés à la particularité qu’ils sont en face d’humains.

 

Aller au-delà de ses peurs pour autoriser et encadrer de nouveaux horizons thérapeutiques aux efficacités avérées est l’œuvre d’une conscience humaine et non politico-business.

Prendre en compte l’avis/la vie des malades est la volonté de proposer une liberté de choix.

Pourvu que la commission Vaillant ait cette liberté et n’avorte pas dans l’œuf…… !!

 

Auteur: Philippe Sérié

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