Cannabis : la France sur le point de légaliser officiellement le CBD

Pour se mettre en conformité avec la législation européenne, la France a présenté aujourd’hui à la Commission Européenne un projet d’arrêté autorisant production et commercialisation du CBD, dérivé non psychotrope du cannabis. La vente de fleurs reste cependant interdite.

L’arrêté prévoit de légaliser la production et la commercialisation de CBD, notamment sous forme d’huile, mais interdit formellement la commercialisation des fleurs et feuilles. (Getty Images)


La France vient de publier un projet d’arrêté auprès de la Commission Européenne prévoyant d’élargir l’usage de la plante de chanvre, et notamment de légaliser les huiles de cannabidiol ( CBD ).

Le texte, sur lequel la Commission et les Etats membres doivent remettre un avis circonstancié dans un délai de trois mois, prévoit en outre que « l’autorisation de culture, d’importation, d’exportation et d’utilisation industrielle et commerciale du chanvre est étendue, sous certaines conditions, à toutes les parties de la plante de chanvre. »

Un dérivé du chanvre non psychotrope

Jusqu’ici, aucun texte officiel n’autorisait la commercialisation de chanvre, autre que sous forme textile ou cosmétique. Le CBD était toutefois toléré depuis le 19 novembre 2020 et l’avis rendu par la Commission Européenne dans l’affaire « Kanavape » .

Celui-ci précisait que ce dérivé non psychotrope du cannabis ne pouvant être considéré comme stupéfiant, il pouvait librement circuler dans l’Union Européenne s’il avait été légalement produit dans un des pays membres.

Cependant, il n’était toujours pas possible pour les agriculteurs et industriels français d’en produire sur le territoire national. Seules les fibres et les graines de la plante pouvant être exploitées. « La procédure complète de notification à la Commission Européenne peut prendre jusqu’à six mois, ce qui signifierait une publication officielle de l’arrêté en janvier 2022 » explique Ludovic Rachou, président de l’Union des Industriels pour la Valorisation des Extraits de Chanvre (UIVEC).

D’autant que les professionnels n’ont aucune inquiétude quant à un éventuel blocage de l’arrêté par la Commission, puisqu’il vise justement à se mettre en conformité avec la législation Européenne.

Une première étape

« Ce n’est qu’une première étape dans la réglementation française sur le CBD, mais cela va dans le bon sens et devrait dépassionner le débat, puisque l’arrêté acte au niveau national que le CBD n’est pas un stupéfiant. C’est un grand soulagement » ajoute Ludovic Rachou.

Pour les représentants du secteur, la prochaine étape consistera à clarifier les normes applicables aux différentes typologies de produits finis (huiles à vapoter, produits alimentaires au CBD…). Un travail qui s’annonce complexe, d’autant plus qu’il devrait dans l’idéal être terminé avant la fin de la période de notification de six mois.

Les fleurs et feuilles officiellement interdites

L’arrêté n’apporte cependant pas que des bonnes nouvelles pour les CBD-Shops et autres buralistes, puisqu’il précise que «la vente aux consommateurs de fleurs ou de feuilles brutes sous toutes leurs formes, seules ou en mélange avec d’autres ingrédients, notamment comme produits à fumer, tisanes ou pots-pourris […] est interdite. »

Une décision qui fait bondir certains professionnels pour qui les fleurs peuvent représenter aujourd’hui jusqu’à la moitié de leurs chiffres de ventes. « C’est un texte d’inspiration idéologique qui sacrifie des dizaines de milliers de consommateurs qui se sont tournés vers le CBD et ses nombreux effets thérapeutiques, notamment, s’agissant de la fleur, en remplacement du THC !» s’indigne Charles Morel, avocat et président de la jeune Union des Professionnels du CBD. Si le CBD ne doit pas être confondu avec le cannabis thérapeutique , qui lui contient du THC, il existe encore un débat sur les propriétés du cannabidiol.

Un marché de 700 millions d’euros

«  La seule raison invoquée par la Mildeca [Mission Interministérielle de Lutte contre les Drogues et les Conduites Addictives, NDLR] pour justifier la prohibition de la fleur, c’est l’insuffisance des moyens alloués aux policiers, gendarmes et douaniers pour les équiper de tests capables de différencier THC et CBD. Or le coût du déploiement de ces tests est infime comparé aux bienfaits économiques, sanitaires et écologiques de l’existence d’une filière française du CBD, allant du producteur au consommateur  », renchérit Charles Morel, qui promet donc de s’engager dans une bataille judiciaire, en opposition à cet arrêté.

Selon l’UIVEC, et même dans ces conditions, le marché français du CBD pourrait représenter près de 700 millions d’euros dès 2022.

Léo Da Veiga

Source : lesechos.fr

Auteur: Philippe Sérié

Partager cet article :