Conditions de sécurisation de l’expérimentation du cannabis médical

Qualité et sécurité des produits

Les médicaments à base de cannabis utilisés pour l’expérimentation et destinés aux patients, se présentent sous forme de produits finis qui ne nécessiteront pas de préparation ou de transformation.
Ces médicaments répondent à des critères de qualité définis dans le cahier des charges qui précise les exigences concernant le mode de production de la matière première et des produits finis, la qualité attendue des produits finis et la description des contrôles réalisés pour garantir leur qualité. Les produits retenus doivent être fabriqués selon les Bonnes pratiques de fabrication (BPF).
Des contrôles sur des échantillons de produits provenant des fabricants sélectionnés sont effectués par nos laboratoires tout au long de l’expérimentation.

Pour les pays tiers à l’UE, ce statut BPF ou équivalent des sites de production pourra être vérifié par la Direction de l’Inspection de l’ANSM en s’appuyant sur des accords de reconnaissance mutuelle qu’a la France avec les différents pays qui hébergent les sites de production.
L’ANSM pourra également diligenter des inspections sur site si besoin, après information de l’autorité nationale compétente. 

Sécurisation du circuit de la mise à disposition des médicaments

Approvisionnement et distribution 

Le cannabis étant un produit stupéfiant, toutes les opérations qui lui sont relatives pendant l’expérimentation font l’objet d’autorisations délivrées par l’ANSM en tant qu’autorité nationale désignée par l’ONU et dont les missions figurent dans le Code de la santé publique. Ainsi, pour chaque opération d’importation et d’exportation, une autorisation (permis) est obligatoire et implique des procédures de présentation en douanes, y compris au sein de l’Union Européenne. De même, tous les opérateurs qui interviennent dans l’expérimentation doivent être dument autorisés par l’ANSM.
L’approvisionnement des pharmacies françaises au cours de l’expérimentation suivra également toutes les démarches réglementaires obligatoires pour les stupéfiants.
Les médicaments utilisés pendant l’expérimentation proviennent de fournisseurs, en nombre restreint, qui fabriquent déjà du cannabis médical dans les pays où il est autorisé. Dans le cadre d’un partenariat, chaque fournisseur s’est associé à un établissement pharmaceutique autorisé en France, exploitant de médicament. Ces exploitants français centraliseront et assureront la sécurisation de l’importation du cannabis médical, son stockage et sa distribution aux pharmacies. Ces distributeurs devront répondre également à un cahier des charges.

Prescription et dispensation

L’initiation du traitement est strictement réservée aux médecins volontaires exerçant dans des structures de référence volontaires, situés dans des établissements de soins, majoritairement hospitaliers. 
Pour prescrire et dispenser le cannabis médical lors de l’expérimentation, les professionnels de santé, médecins et pharmaciens sont volontaires et doivent impérativement avoir suivi et validé au préalable une formation en e-learning d’une durée de 2h30 élaborée par l’ANSM en collaboration avec des enseignants, des cliniciens français et étrangers et des patients experts. Cette coopération permet d’offrir un support de formation commun à tous les professionnels de santé, indépendant d’un fournisseur de cannabis à usage médical et adapté au système de soins français. Cette démarche garantit l’indépendance des professionnels de santé vis-à-vis des laboratoires et des intervenants économiques. 
La validation de cette formation est une condition nécessaire et obligatoire pour que les médecins et les pharmaciens volontaires puissent être inscrits dans le registre de suivi des patients de l’expérimentation dans lequel ils devront renseigner des données à chaque prescription et dispensation.

Les pharmaciens  de ville et les pharmaciens des PUI dans les structures référencées commanderont le cannabis à usage médical, le dispenseront – uniquement si le prescripteur a suivi la formation et renseigné le registre lors de la prescription – et auront également un rôle de conseil auprès des patients.
Le cannabis et les produits qui en dérivent sont des stupéfiants : ils sont donc prescrits sur une ordonnance dite « sécurisée » et stockés dans des coffres fermés à clé, comme le prévoit la réglementation des stupéfiants.

A noter :  

  • une PUI non autorisée à rétrocéder peut dispenser du cannabis médical à un patient hospitalisé, sur présentation d’une ordonnance par le service clinique ;
  • si un patient en ambulatoire se présente, pas de dispensation des médicaments et orientation vers une PUI autorisée à rétrocéder.

Focus sur la formation des professionnels de santé

La formation est constituée de chapitres communs aux médecins et pharmaciens et de chapitres spécifiques à la prescription par indication et à la dispensation de cannabis médical. Elle comporte également un module « Ressources documentaires » composé des synthèses de tous les chapitres, de fiches techniques et d’une revue documentaire, téléchargeables en PDF. 
Pour valider la formation, les professionnels de santé devront réussir les tests de fin de chapitres obligatoires ainsi que le test final.
L’inclusion des patients ayant lieu exclusivement dans l’une des 200 structures de référence volontaires sélectionnées par l’ANSM et prenant en charge au moins l’une des cinq indications thérapeutiques retenues pour l’expérimentation, l’accès à la formation est réservé dans un premier temps, depuis le 1er mars, aux médecins volontaires de ces structures de référence et aux pharmaciens des pharmacies à usage intérieur (PUI) de ces mêmes structures.L’accès s’ouvrira ensuite progressivement, dans la limite de 4 500 accès au total et dans un premier temps, au rythme des inclusions aux médecins libéraux, généralistes et spécialistes ainsi qu’aux pharmaciens d’officine dont un patient sera inclus dans l’expérimentation.
En effet, chaque patient inclus dans l’expérimentation pourra solliciter directement son médecin et son pharmacien pour qu’ils le prennent en charge pendant l’expérimentation. Il faudra alors que ceux-ci, s’ils acceptent, suivent et valident la formation obligatoire.

Par ailleurs et afin que les premiers patients inclus situés dans des zones géographiques éloignées des PUI des structures de référence puissent obtenir leurs médicaments en ville, une cinquantaine d’accès sera proposée aux officinaux. Un appel à candidatures national a été lancé le 9 mars 2021 par l’ANSM.

Pour un aperçu des modules de formation, rendez-vous sur notre chaine YouTube

Contre-indications et précautions d’emploi

L’ANSM rappelle que le cannabis médical est contre-indiqué :

  • chez la femme enceinte et allaitante ; une contraception efficace doit être mise en place chez les femmes en âge de procréer ;
  • en cas d’antécédents personnels de troubles psychotiques ;
  • en cas d’insuffisance rénale, hépatique ou cardiaque grave.

Le cannabis médical, surtout sur une longue période, peut entrainer une dépendance. Il a une influence sur l’aptitude à conduire des véhicules et à utiliser des machines car il peut provoquer une somnolence ou des étourdissements et altérer la coordination, le jugement, le temps de réponse. Ainsi, la conduite de véhicules est interdite pour les patients inclus dans l’expérimentation. 
Comme tout médicament, le cannabis nécessite des précautions d’emploi, peut entrainer des effets indésirables et peut interagir avec d’autres médicaments ou des aliments. L’ANSM rappelle enfin qu’il ne faut jamais interrompre brutalement un traitement et rapporter les non utilisés en pharmacie.

Suivi des patients

Le registre national électronique de suivi (ReCann)

Pour suivre le déroulement de l’expérimentation et permettre son évaluation, l’ANSM a conçu et met à disposition des professionnels de santé de l’expérimentation, volontaires et ayant validé la formation obligatoire, un registre national électronique. Les professionnels de santé y auront accès via leur numéro professionnel RPPS et tous les patients de l’expérimentation seront obligatoirement suivis grâce à ce registre. Certaines données personnelles des patients y sont recueillies et le registre comporte différents items permettant d’évaluer la faisabilité du circuit et son acceptabilité par les patients (délai d’obtention d’un rendez-vous, délai de dispensation après présentation de l’ordonnance, facilité à trouver une pharmacie, etc.). Le registre permettra également de recueillir des données sur les posologies dispensées, l’efficacité, les effets indésirables et le retentissement sur la qualité de vie par exemple. Ce registre sera renseigné par les prescripteurs et les pharmaciens. Il ne se substitue pas néanmoins au dossier médical des patients.
Un consentement éclairé à participer à l’expérimentation et être inscrit dans le registre devra être signé par le patient. Les données pourront être utilisées ultérieurement pour des recherches présentant un intérêt pour la santé publique. Ces recherches devront cependant être faire l’objet d’autorisation spécifique. Les données permettant l’identification des patients seront conservées deux ans après la fin de l’expérimentation. Les autres seront conservées pendant une durée supplémentaire de dix ans.

La consultation initiale d’inclusion

Au cours de la consultation initiale d’inclusion, le professionnel de santé de la structure de référence volontaire informe le patient des conditions de l’expérimentation, de ses droits et modalités de retrait. Un carnet de suivi conçu par l’ANSM et comportant des informations détaillées lui sera remis. Le médecin recueille son consentement à participer à l’expérimentation (et à être inscrit dans le registre) via un premier formulaire à remplir. Un second formulaire sert à recueillir l’autorisation du patient pour transmettre son numéro de sécurité sociale (NIR) [elle n’est pas obligatoire] permettant des recherches ultérieures qui devront cependant faire l’objet d’autorisation 

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Auteur: Philippe Sérié

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