Enquête canadienne : des ingrédients du cannabis repousseraient le coronavirus

La question de savoir si le cannabis – ou les substances actives de cette plante – peut être efficace contre la COVID-19 maintient en ce moment le monde en suspens.  Elle fait l’objet de débats sur les réseaux sociaux depuis deux mois et elle est sous enquête notamment par des chercheurs en Allemagne et en Israël.

Deux chercheurs canadiens mènent leur propre enquête sur cette question dans le sud de la province de l’Alberta à l’Université de Lethbridge. Les docteurs Igor et Olga Kovalchuk ont publié dans la revue spécialisée Preprints les résultats de leur enquête préliminaire.

Ils ont étudié plus de 400 souches de marijuana. La conclusion? Au moins une douzaine de souches se sont révélées prometteuses, selon eux, pour empêcher le virus de se fixer sur les cellules humaines de la bouche, des intestins ou des poumons.

Les résultats pré-cliniques des chercheurs, non évaluée par des pairs, ont été publiés en ligne sous le titre « In Search of Preventative Strategies ». Ils indiqueraient que certaines composante du cannabis réduisent 70 % des portes d’accès du coronavirus aux cellules humaines.

Des résultats non confirmés et qu’il faut nuancer

La théorie des deux scientifiques de l’Université de Lethbridge est que certains extraits de cannabis arrivent à s’interposer entre le coronavirus et les cellules humaines en enlevant le nombre de serrures que le coronavirus peut crocheter pour pénétrer dans ces cellules.

« Cela veut dire que le virus a moins de chances d’entrer dans les cellules […] ce qui réduit grandement le risque d’infection. […] Vous avez donc plus de chances de vous battre » explique le Dr Igor Kovalchuk.

Si on peut réguler les récepteurs, ajoute le docteur Kovalchuk, moins de gens seront malades et parmi ceux qui le seront, les complications seront plus rares.

Particules du virus du SRAS-CoV-2 isolées sur un patient. INSTITUT NATIONAL DES ALLERGIES ET DES MALADIES INFECTIEUSES, NIH

Propriétés contre l’inflammation des poumons

Les chercheurs estiment en outre que certaines composantes du cannabis sur lesquelles ils enquêtent permettraient aussi une diminution de l’inflammation et un ralentissement de l’activité du coronavirus.

Le docteur Igor Kovalchuk précise cependant que les substances étudiées contiennent de multiples molécules et qu’il est difficile de savoir lesquelles de  ces molécules sont responsables de l’effet bénéfique observé.

« On pourrait avoir besoin de plusieurs années avant de comprendre ce qui se passe», indique t-il.

Ce n’est pas la première fois que l’on étudie le cannabis comme stratégie de prévention et de traitement d’un coronavirus. Des recherches antérieures ont examiné l’effet de ce médicament sur le SRAS-CoV, le coronavirus responsable du syndrome respiratoire aigu sévère, qui a provoqué une épidémie en 2003. (AP Photo/Don Ryan)

Trop tôt pour célébrer ou pour faire place à la fête

Les chercheurs albertains déconseillent fortement à quiconque d’essayer d’utiliser le cannabis pour affronter le coronavirus.

Les extraits de cannabis présentement évalués n’ont rien à voir avec le cannabis disponible en vente libre au Canada. Il s’agit d’extraits spécialement cultivés, riches en cannabinol et faibles en THC. Les chercheurs disent en outre avoir identifié d’autres substances qui, à l’inverse, pourraient aggraver l’état des patients atteint de la COVID-19.

Les deux chercheurs s’inquiètent du fait que leurs données sont basées sur des tissus humains et ils indiquent que la prochaine étape sera cruciale et qu’elle consiste à mener des essais cliniques.

« Nos premières conclusions justifient une enquête plus approfondie, mais il est possible que les produits médicaux à base de cannabis puissent devenir une thérapie d’appoint sûre pour le traitement du COVID-19″, renchérit le Dr Kovalchuk.

Compte tenu de la situation épidémiologique actuelle, qui est désastreuse et qui évolue rapidement, il faut envisager, selon lui, toutes les possibilités thérapeutiques et toutes les avenues de traitement possibles. « Notre équipe de recherche recherche activement des partenariats pour mener des essais cliniques » explique le biologiste.

Deux chercheurs qui ont une solide expérience

Les docteurs Igor et Olga Kovalchuk étudient depuis 2015 les effets d’extraits de cannabis sur différentes maladies ayant notamment une composante inflammatoire importante, comme l’arthrite rhumatoïde, le psoriasis ou le syndrome du côlon irritable.

Olga Kovalchuk (Globe and Mail)

 

C’est la Dre Olga Kovalchuk qui, en réaction à la pandémie, a eu l’idée d’éplucher leurs données sur des extraits qui pourraient freiner le SRAS-CoV-2. Elle a publié dans le passé plus de 120 articles de recherche évalués par des pairs. Son mari, Igor a publié plus de 150 articles évalués par des pairs, de nombreux livres et détient 10 brevets.

Les chercheurs sont en ce moment à la recherche du financement nécessaire pour organiser des essais cliniques chez l’humain.

Un vaccin contre le coronavirus avec des ingrédients du cannabis?

Olga Kovalchuk (Globe and Mail)

Plus tôt ce mois-ci, dans la province voisine, des chercheurs de l’Université de la Saskatchewan ont révélé se pencher sur l’utilisation de composés de cannabis comme vaccin potentiel contre la COVID-19.

Spécialisée dans les maladies infectieuses, l’équipe de recherche affirme qu’un antigène d’origine végétale pourrait être plus facile à produire commercialement à grande échelle que les antigènes d’origine animale.

Les chercheurs universitaires travaillent avec Zyus Life Sciences, une entreprise de cannabis médical basée à Saskatoon en Saskatchewan pour déterminer si les composés à base de cannabis peuvent jouer un rôle dans la lutte contre le nouveau coronavirus. L’année dernière, cette entreprise avait reçu de Santé Canada un permi pour développer des produits médicaux à base de cannabis.

 

Source : rcinet.ca

 

 

 

Auteur: Philippe Sérié

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