Le Conseil de l’Europe réitère la nécessité d’adopter des politiques des drogues fondées sur les droits de l’homme

Une nouvelle approche de la drogue dans les 27 États membres de l’Union européenne devrait servir de base à une réforme du cannabis au niveau continental.

Au début du mois, le Conseil de l’Union Européenne (UE) a adopté un document d’orientation intitulé « Conclusions du Conseil sur une approche fondée sur les droits de l’homme dans les politiques en matière de drogue ».

Sous l’impulsion de la République Tchèque, qui a présidé l’Union européenne pendant six mois, ce document apporte un soutien immédiat aux initiatives de ce pays et de l’Allemagne en faveur de marchés réglementés du cannabis pour les adultes.

Tout en reconnaissant le droit des pays à dépénaliser la possession personnelle et à protéger la santé de leurs citoyens, le document coche toutes les cases de la diversité, de l’égalité et de l’inclusion, tout en adoptant une approche nouvelle et plus musclée de la politique en matière de drogues et des droits de l’homme.

Priorités et besoins nationaux

L’un des points les plus significatifs est l’articulation, pour la première fois, de la possibilité pour les États-nations « de concevoir et de mettre en œuvre des politiques nationales en matière de drogues en fonction de leurs priorités et de leurs besoins ».

Kenzi Riboulet-Zemouli, chercheur en politique internationale des drogues basé à Barcelone, a déclaré : « C’est formidable d’avoir ce nouveau document politique qui renforcera les positions qui se sont développées ces dernières années. Il fournira une importante plateforme structurelle pour une réforme progressive à moyen et long terme. »

Si l’UE a déjà exposé ces positions oralement, par exemple devant la Commission des stupéfiants des Nations unies, c’est la première fois qu’elles sont formulées dans une politique du Conseil de l’UE.

Le Conseil de l’UE, qui est composé de représentants des gouvernements de chacun des États membres, est le principal organe législatif de l’UE.

Kenzi a ajouté : « C’est le résultat de négociations entre les 27 gouvernements de l’UE et, en représentant les nombreuses discussions et les connaissances partagées de ses membres, c’est le signe d’un progrès significatif dans la réforme de la drogue. »

« Cela représente un réel progrès dans toute l’Europe et signifie l’aube d’une approche plus éclairée de la drogue. »

En Allemagne, le nouveau document d’orientation est déjà accueilli comme un coup de pouce en faveur de sa proposition de légalisation du cannabis.

Kai-Friedrich Niermann, avocat allemand spécialisé dans le cannabis, a déclaré : « Il est bien connu que l’UE, y compris le Conseil, réclame depuis longtemps une nouvelle politique en matière de drogues qui tienne compte de la protection de la santé et des droits de l’homme. Il s’agit maintenant de l’épreuve décisive. »

« Le fait que le Conseil européen se souvienne une fois de plus de ces principes est certainement utile. Dans sa réforme, l’Allemagne pourra donc se référer précisément à ces principes de la politique européenne en matière de drogues, qui ont été débattus pendant des années. »

« À cet égard, la publication de ce document à ce moment précis est certainement utile. »

Politique du Conseil de l’UE

Le document de neuf pages comprend quelque 13 points d’action et une trentaine de principes de base. Il expose son point de vue en déclarant :

« (Nous) invitons les États membres de l’UE à soutenir davantage l’élaboration et la mise en œuvre de politiques et d’interventions fondées sur des données probantes qui placent les droits de l’homme au centre de la lutte contre la drogue, tout en luttant contre la criminalité et en assurant la sûreté et la sécurité publiques, des moyens de subsistance durables et viables et la santé des individus, des familles et des communautés dans toute l’UE. »

En ce qui concerne l’indépendance des États membres, le texte dit ceci : « NOTANT également que la position commune du système des Nations unies sur la politique en matière de drogue reconnaît que les conventions des Nations unies sur le contrôle des drogues permettent aux pays de concevoir et de mettre en œuvre des politiques nationales en matière de drogue en fonction de leurs priorités et de leurs besoins, conformément au principe de responsabilité commune et partagée et au droit international applicable. »

Elle poursuit en soulignant les questions liées aux droits de l’homme, à la dépénalisation, à la déstigmatisation et à la coopération internationale, entre autres.

Mouvements paneuropéens en faveur de la réforme

L’Allemagne devait publier son projet de loi sur le cannabis à usage adulte d’ici la fin de l’année, mais il semble maintenant que cela sera reporté au printemps.

Ces derniers mois, la République tchèque, Malte et le Luxembourg ont travaillé en étroite collaboration avec l’Allemagne pour élaborer une législation européenne plus libérale sur le cannabis.

Et, alors qu’il a été démontré que les États-nations peuvent élaborer leurs propres politiques en matière de drogues en conformité avec les conventions internationales, il y a encore beaucoup de discussions concernant la possibilité pour l’UE d’entraver ou de retarder ces objectifs.

M. Niermann a ajouté : « L’UE n’a cessé de parler d’une approche nouvelle et saine de la politique en matière de drogues à plusieurs reprises. »

« Mais il est intéressant de constater que le Conseil de l’UE réitère cette approche, ce qui pourrait indiquer que la question de la légalisation du cannabis est désormais sur le bureau des gouvernements des États membres de l’UE. »

Toutefois, il émet un brin de prudence et lance un appel aux armes, ajoutant : « Mais, jusqu’à présent, ce ne sont que des mots, les gouvernements qui ont l’intention de légaliser doivent être audacieux et commencer le processus en adoptant une loi respective, qui légalise toute la chaîne d’approvisionnement. »

« Sinon, nous ne saurons jamais quelle interprétation des ‘obligations internationales’ doit être privilégiée. »

En 2020, le Conseil de l’UE a adopté une politique en matière de drogues jusqu’en 2025. Il travaille également sur une nouvelle politique pour la dernière partie de la décennie, qui sera dévoilée dans deux ans.

Source : newsweed.fr

Documents européens sources :

Lisbon declaration

2023 – 2025 Work Programme – ‘Human Rights at the heart of drug and addiction policies’

Auteur: Philippe Sérié

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