Cannabis thérapeutique: pourquoi certaines drogues sont-elles traitées différemment?

Jean Colombera

Jean Colombera

Membre de l’ICRS et député à la Chambre des représentants à Luxembourg

CANNABIS THÉRAPEUTIQUE – Les indications médicales concernant le cannabis sont en partie démontrées et en partie spéculatives, mais toutefois elles devraient être intéressantes pour chacun, classe politique y comprise, pour qui la souffrance de l’homme n’est pas indifférente.

La question que tout le monde devrait se poser est pourquoi certaines drogues sont traitées différemment que d’autres drogues?

En tant que médecin je me demande pourquoi d’un côté les problèmes d’abus de drogues relèvent du domaine médical et de l’autre côté ils relèvent du domaine légal. Cela n’a aucun sens de chercher une explication scientifique ou pharmacologique. Certaines drogues sont légales, d’autres drogues sont illégales. Le tout est arbitraire et capricieux.

Tout dépend du lieu où on se trouve

La même substance peut être légale ou illégale, un médicament, un poison, un épice, un saint sacrement ou un outil du diable.

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Les drogues psychoactives ont joué un rôle important dans l’histoire humaine

La mythologie grecque est surplombée d’histoires narratives concernant les drogues. Les anciens philosophes tels Homère, Virgile ou Ovide étaient de grands consommateurs de drogue. Ils avaient un savoir énorme au sujet des drogues de telle façon que seulement celui qui a expérimenté ces drogues peut avoir.

Citons pour exemple l’Odyssée d’Homère qui est bourrée d’expériences en relation avec des drogues et étant une pièce maîtresse de la narco-mythologie.

N’oublions pas la couleur rouge et blanc du père Noël qui rend heureux tous les enfants, couleurs empruntées au champignon amanite tue mouche que les shamans Koriak de la Sibérie de l’Est consommaient pour provoquer des hallucinations et entrer en communication avec leur déité sensée leur transmettre la clé du bonheur.

Je voudrais citer au passage Obelix tombé dans une potion magique et les Gaulois défendant le village de Laudanum et aussi Sherlock Holmes le héros de Conan Doyle qui certainement n’avait pas rempli sa pipe avec du tabac, mais avec du Cannabis.

Tous ces exemples nous mettent en relation avec notre passé culturel ou la drogue n’était pas bannie du patrimoine sociétal. Ce n’est qu’après la xénophobie pratiquée à outrance envers des travailleurs étrangers et la naissance de l’industrie du plastique refoulant de manière absolument dévastatrice l’économie bien portante du chanvre que le Cannabis fut prohibé et ceci contre tout avis médical, cannabis qui à l’époque (je parle de 1937) était dans le Hitparade des 3 médicaments les plus vendus en Amérique.

Grâce à la persévérance de certains idéalistes et bienfaiteurs de l’humanité le Cannabis commence à reprendre sa place au soleil dans le domaine médical

N’empêche que le manque d’information et des lois vétustes constituent un frein à l’expansion de cette plante qui se révèle être la plante pouvant traiter de nombreux symptômes tels la douleur, la dépression, le manque d’appétit, l’insomnie, l’angoisse, l’inflammation. Tous ces symptômes sont rencontrés dans maintes maladies et je voudrais citer en premier lieu cette maladie de civilisation appelée cancer.

Des maladies traitées par cortisone, morphiniques et autres médicaments opioïdes, calmants, antidépresseurs, somnifères, médicaments qui ont une liste d’effets secondaires ahurissants entraînant d’autres maladies multi systémiques difficilement diagnosticables et surtout intraitables nécessitant l’élargissement des structures médicales hospitalières, pourraient bénéficier d’un traitement au Cannabis en diminuant de façon considérable la misère individuelle, une misère individuelle qui commence à devenir insupportable du point de vue éthique.

Je suis content qu’il y ait toujours plus de malades qui se révoltent contre cette politique inhumaine, indigne méprisant la nature même de l’homme en lui interdisant par des réglementations insensées privées de toute logique le retour à une qualité de vie meilleure. C’est la moindre des choses qu’on devrait souhaiter à son proche.

Ce qui me réjouirait le plus, c’est que les médecins s’éveillent et s’informent pour contribuer à briser cette omerta de certaines loges politiques occupées à briller pour obtenir un bon scrutin lors des prochaines élections. Personnellement j’ai déjà eu affaire avec les rouages de la Justice pour avoir prescrit du Cannabis médical.

Le comble c’est que malgré le fait que la loi prévoit que toute substance (que cette substance soit une plante ou autres) qui guérit ou prévient une maladie est un médicament, la machine judiciaire a dû inventer des arguments pour ne pas m’acquitter, notamment à dire que la Santé n’est pas un droit fondamental inscrit dans la Constitution et que j’ai oublié à dire au juge que le traitement au Cannabis était une nécessité. Je n’ai cependant pas été condamné, mais mis en Stand-By pendant un an. Antoine de Rivarol a dit un jour:

« Il y a quelque chose de plus haut que l’arrogance et de plus noble que la vanité, c’est la modestie; il y a quelque chose qui est plus rare que la modestie… c’est la simplicité ».

Cette simplicité d’esprit est manquante à des technocrates se complaisant à suivre à la lettre des paragraphes empoussiérés privés de tout bon sens humain.

Laissons cependant tout négativisme de côté et orientons-nous vers l’avenir

L’expérimentation clinique va nous ouvrir de nouveaux horizons dans le champ thérapeutique. Des essais avec différentes plantes de cannabis sur patients cancéreux au stade terminal menés en toute clandestinité ont montré des résultats spectaculaires dans le sens d’un arrêt du processus tumoral sans pouvoir l’éliminer. Ce serait en tout cas un outil thérapeutique supplémentaire dans l’arsenal thérapeutique usuel pour combattre ce fléau.

C’est en tout cas dommage que la majeure partie de la recherche scientifique sur le terrain doit se faire sur un terrain hors la loi. Il faudra changer de mentalité en ce qui concerne le cannabis. Une changement de conscience s’avère de mise pour changer des mentalités soi-disant conservatives. Il n’y aura pas de changement sans évolution vers une vue intégrale de la politique concernant les drogues.

En espérant que Confucius a eu raison, lorsqu’il a dit que « la plus grande gloire n’est pas de jamais tomber, mais de se relever après chaque chute », je propose de nous remettre en question et de préférence tous les jours.

 

Source : http://www.huffingtonpost.fr/jean-colombera/cannabis-therapeutique_b_2899335.html?utm_hp_ref=email_share

Publication: 18/03/2013

Auteur: Philippe Sérié

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