Ces malades qui, face à la douleur, consomment du cannabis AFP 9/10/12

PARIS – Malgré l’interdiction, des malades consomment déjà du cannabis à des fins thérapeutiques, soulignent des associations qui attendent beaucoup du gouvernement, au moment où une étude souligne ses effets bénéfiques sur la sclérose en plaques.

Un essai réalisé en Grande-Bretagne sur 279 patients tend à démontrer que la consommation d’extrait de cannabis en cachets permet aux personnes souffrant de sclérose en plaques, de diminuer leur raideur musculaire, de moins souffrir et de mieux dormir.

L’ancien ministre socialiste de l’Intérieur Daniel Vaillant a exhorté vendredi son parti à s’engager sur la légalisation du cannabis thérapeutique qui permet de soulager des hommes et des femmes souffrant de maladies neurodégénératives, de certains cancers ou du sida.

La loi française interdit d’acheter, consommer, détenir, donner, revendre ou cultiver du cannabis. Le produit est classé parmi les stupéfiants dénués d’intérêt médical et ne peut donc être prescrit, rappelle la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT).

Pourtant, à l’étranger, l’Italie, la Belgique, les Pays-Bas, ou encore certains états américains admettent la prescription de médicaments issus du cannabis, souligne Jean-Pierre Galland, porte-parole du Collectif d’information et de recherches cannabiques (CIRC).

L’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), qui estime que 1,2 million de personnes sont des usagers réguliers de cannabis, ne dénombre pas ceux qui le font à usage thérapeutique.

Pour Farid Ghéhiouche, porte-parole du collectif Cannabis sans frontière, peut-être un million de personnes utilisent le cannabis pour apaiser leurs douleurs, comme celles souffrant de maladies dégénératives, de sclérose en plaque, de lupus, de polyarthrites rhumatoïdes, celles sous chimiothérapie ou séropositives.

Parcours du combattant

Or seuls les patients disposant d’une autorisation temporaire d’utilisation (ATU), délivrée par l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), peuvent consommer, sans être poursuivis, un médicament contenant du THC (substance active du cannabis), le Marinol.

Fin octobre 2011, un peu plus d’une centaine d’ATU avaient été accordées pour ce médicament, et moins d’une cinquantaine refusées, selon l’ANSM.

Mais la demande, qui doit être faite avec l’appui de son médecin, est un parcours du combattant, et la plupart des usagers préfèrent fumer la plante, car le Marinol n’est pas assez puissant, affirme Jean-Pierre Galland.

Lorsque les pathologies sont lourdes, les traitements sont aussi importants et le cannabis soulage les dommages collatéraux, explique Fabienne Lopez, présidente de l’association Principes actifs, qui regroupe des malades consommant du cannabis.

Elle-même sous chimiothérapie après un cancer, elle souffrait de démangeaisons qui la faisait se gratter jusqu’au sang, et de crampes en permanence: J’ai découvert que si je fumais du cannabis, je n’avais plus de crampes ni de démangeaisons.

Faute de pouvoir obtenir et consommer légalement, de nombreux malades sont dans l’illégalité, d’autant que beaucoup se lancent dans la plantation, note Fabrice Olivet, de l’association Asud (Autosupport des usagers de drogue).

C’est le cas de Fabienne Lopez, qui cultive uniquement pour sa consommation. Son médecin traitant la soutient et lui a écrit une lettre justifiant sa consommation de cannabis. Mais ce document n’a aucune portée légale.

On parle souvent des deux ou trois personnes qui ont été jugées et dispensées de peine ou relaxées, mais la majorité sont condamnées à du sursis avec mise à l’épreuve et à des amendes, dit-elle.

AFP / 09 octobre 2012 16h41)

Auteur: Philippe Sérié

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