Le délicat usage du cannabis thérapeutique

Même si ses qualités curatives sont reconnues, le cannabis utilisé en tant que traitement médical continue fait polémique aux Etats-Unis, où il est autorisé, comme en France, où il ne l’est pas.

Aux Etats-Unis, quatorze Etats autorisent la vente de cannabis à usage thérapeutique.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La description récente d’un syndrome grave et rarissime lié à l’usage du cannabis au dernier congrès annuel de la société américaine de gastroentérologie à Las Vegas, replace cette substance sous les projecteurs. La pathologie se caractérise par des nausées et vomissements répétés et des douleurs abdominales intenses chez certains consommateurs réguliers. Les Américains s’intéressent d’autant plus au phénomène que cette drogue est autorisée à des fins thérapeutiques dans quatorze États de l’Union, et le nombre de points de vente aux allures de coffee shops explose. Une situation qui nourrit la polémique car la vente de cannabis thérapeutique va à l’encontre de l’avis de l’agence américaine du médicament (FDA) qui craint des dérives.

«La question n’est pas de savoir si le cannabis a des vertus thérapeutiques car la réponse est oui, explique Michel Reynaud, chef du service d’addictologie de l’hôpital Paul Brousse à Villejuif (Ile-de-France). Les niveaux de preuve sont bons dans de nombreuses indications et cette substance est une alternative ou un complément pour traiter certains patients». Mais, met-il en garde, «le problème est de savoir sous quelle forme cela doit se faire. Le cannabis acheté tel quel, cultivé chez soi, fumé, entraîne un risque de dérive incontestable et de complications liées au fait de fumer – un cancer du poumon par exemple. En revanche, des extraits de plantes ou de dérivés de synthèse sous forme de médicaments comme le dronabinol, le nabilone ou encore le nabiximols, en comprimés ou spray oral, sont aujourd’hui disponibles en pharmacie dans plusieurs pays d’Europe comme l’Allemagne et le Royaume-Uni et permettent d’encadrer l’utilisation thérapeutique du cannabis, ou pour être plus précis de ses substances actives, les cannabinoïdes».

Rercherches sur l’aide au sevrage

À ce jour, plusieurs études internationales confirment le bénéfice de ces cannabinoïdes dans de nombreuses indications: douleurs neurologiques dans le cadre de la sclérose en plaque, stimulation de l’appétit chez les patients atteints du sida, prévention des nausées et vomissements chez des personnes touchées par un cancer, mais également spasmes et crampes musculaires, glaucome, épilepsie.

En outre, les addictologues envisagent son utilisation pour sevrer les patients dépendants au cannabis et pour qui l’abstinence est très douloureuse. C’est l’une des pistes explorées par Margaret Haney à l’Institut de psychiatrie à l’université de Columbia à New York. «J’ai évalué de très nombreux médicaments dans le sevrage au cannabis. À ce jour, le dronabinol à base de THC, substance active du cannabis, est le plus efficace sur les symptômes du sevrage mais n’a pas d’effet sur le niveau de consommation. Je poursuis donc mes recherches et vais expérimenter le nabilone, un analogue du dronabinol, qui paraît plus prometteur encore», explique-t-elle.

La France reste en marge de ces recherches compte tenu de l’interdiction légale d’utiliser le cannabis et ses dérivés. Néanmoins, l’ancien ministre de l’Intérieur Daniel Vaillant confiait au quotidien Libération début octobre qu’il envisageait déposer un projet de loi en tant que député pour légaliser le cannabis thérapeutique et appelait ses amis politiques à «un peu de courage». Le dossier pourrait donc refaire surface dans les mois à venir.

Par Aude Rambaud – le 02/11/2012

Source : Figaro Santé 

Auteur: Philippe Sérié

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