
Les patients qui ont recours au cannabis thérapeutique vont-ils pouvoir continuer d’être traités ? Faute de décision du gouvernement, l’expérimentation est prolongée jusqu’au 30 juin 2025. Mais après ? Impensable d’arrêter pour Aude Marchal, atteinte d’une sclérose en plaque à Nancy.
La très forte inquiétude des patients soignés avec le cannabis médical. Ils sont une vingtaine suivis au CHRU de Nancy dans les services de neurologie ou de cancérologie. Les traitements à base de cannabis thérapeutique, seuls parfois à pouvoir soulager certaines douleurs, vont-ils perdurer ?
L’expérimentation de l’usage médical du cannabis a été lancé en France en mars 2021. Elle a pris fin officiellement le 31 décembre 2024. Mais le flou règne toujours sur l’avenir de ces traitements et en attendant une décision du gouvernement, les patients actuellement dans l’expérimentation peuvent continuer à les prendre jusqu’au 30 juin prochain.
Un sursis qui n’enlève rien à l’anxiété d’Aude Marcal. Cette Nancéienne de 50 ans souffre depuis 2001 d’une sclérose en plaques. Dès le début de l’expérimentation, elle s’est portée candidate pour apaiser d’intenses douleurs. « Une décharge électrique qui part des aisselles, se diffuse tout le long du bras et vient se terminer dans le bout des doigts et à chaque mouvement, cette décharge part », décrit-elle.
« Comme je suis en fauteuil roulant, à chaque mouvement de mon bras pour pousser les roues de mon fauteuil, schlac, une énorme décharge. C’est juste insupportable. Et en trois semaines, le cannabis thérapeutique m’a supprimé ces décharges, complètement. » Traitement qu’elle prend au quotidien désormais.
« Pourquoi nous faire souffrir volontairement ? »
Si l’usage du cannabis médical venait à disparaître ? « C’est inconcevable », réagit Aude Marchal. « J’estime que c’est de la torture passive. On sait que ça fait du bien, énormément de bien aux personnes qui ressentent les douleurs et des politiques qui n’ont pas ces douleurs, heureusement pour eux, envisagent de stopper ce médicament ? C’est de la torture passive et je rajouterais : préméditée. Parce qu’on parle de l’arrêter, on sait que c’est très utile mais non ! Pourquoi on veut nous faire souffrir volontairement ? »
« Ce serait incompréhensible de s’en passer », renchérit le Pr Debouverie, neurologue et président de la Commission médicale d’établissement du CHRU de Nancy. « Ce sont des médicaments qui sont intéressants et n’ont rien d’une drogue. Quand on l’utilise dans des maladies de ce type, ce n’est pas fumer un joint. On n’en est vraiment pas là ! La problématique, c’est d’essayer d’avoir une meilleure qualité de vie. Donc c’est un médicament », insiste-t-il.
« Tout ce qui peut permettre un peu d’amélioration de la qualité de vie est bon à prendre », poursuit Marc Debouverie. « On connaît les limites de nos thérapeutiques actuellement, que ce soit dans la douleur ou dans la spasticité [raideur musculaire involontaire, NDLR]. Ça permet de donner un peu plus de confort. Des personnes n’ont pas trouvé de bénéfice particulier mais pour d’autres, c’est important. Et à ce jour, il n’y a pas d’alternative qui pourrait donner la même qualité de vie si on était obligé d’arrêter le cannabis médical. »
Le ministre de la Santé, Yannick Neuder, a déclaré le 1er janvier vouloir « étudier » la voie du cannabis médical en France, tout en se disant opposé à une légalisation de son usage récréatif.
Source : francebleu.fr 20 janvier 2025