“Le cannabis thérapeutique a amélioré mon quotidien” : Vincent, atteint de maladies génétiques, teste ce médicament

Depuis 3 ans, Vincent, atteint de maladies génétiques qui le font souffrir, est soigné par du cannabis thérapeutique. Il fait partie d’un programme expérimental du CHU de Clermont-Ferrand. Après une période d’incertitude, l’autorisation complète d’accès au cannabis médical pourrait être délivrée en France en 2026.

Vincent a 39 ans et habite dans le Cher. Cet informaticien et père de 3 enfants est suivi au CHU de Clermont-Ferrand, qui est centre de référence pour le cannabis médical. Il souffre d’une pathologie de Charcot-Marie-Tooth (CMT) de type 1X, une neuropathie héréditaire dans laquelle les muscles des membres inférieurs deviennent faibles et s’atrophient. Il est également frappé par le syndrome d’Ehlers-Danlos de type hypermobile, qui est une maladie du tissu conjonctif qui provoque une hyperlaxité articulaire, une légère hyper-extensibilité cutanée, une fragilité tissulaire et des manifestations extra-musculo-squelettiques. Ce sont deux maladies génétiques. Il explique : “À cause de la CMT, il y a beaucoup de choses qui sont difficiles au quotidien. Je ne peux pas envisager de faire des gestes de précision et de minutie”. Ces maladies ont été diagnostiquées quand il avait environ 15 ans et le font terriblement souffrir.

« J’ai surtout voulu voir s’il y avait beaucoup moins d’effets secondaires »

Vincent a suivi des traitements médicaux lourds avant qu’on lui propose enfin de participer à une expérimentation de cannabis thérapeutique : “Je suis passé par beaucoup de médicaments, comme la morphine, l’opium, le tramadol. On nous donne ce genre de médicaments pour diminuer les douleurs. On bout d’un moment, on augmente les doses, ce qui n’est pas toujours acceptable pour le corps humain. On m’a alors proposé le cannabis médical. J’ai surtout voulu voir s’il y avait beaucoup moins d’effets secondaires. Je ne voulais plus être dans un état de zombie comme avec la morphine et l’opium. Ces traitements me rendaient mou. Les déplacements sont compliqués et j’avais une tête de shooté”. Le trentenaire a alors commencé le cannabis médical il y a 3 ans : “J’en prends sous forme de gouttes, matin, midi et soir. Au niveau de l’atténuation des douleurs c’est bénéfique, même si ce n’est pas aussi fort que la morphine ou l’opium. Je ressens un effet de décontraction. Je me sens apaisé. Le cannabis thérapeutique a amélioré mon quotidien. Le bénéfice est présent”.

Des pharmacies réticentes

Convaincu des bienfaits de ce traitement, il milite pour sa reconnaissance : “Je voudrais que l’usage du cannabis médical soit reconnu car c’est bénéfique. Je pense qu’il y a eu des résultats acceptables depuis le début de l’expérimentation. Cela ne donne à mon sens pas d’effets secondaires néfastes”. Seul bémol qu’il note, l’interdiction de conduire sous les effets du cannabis thérapeutique : “Normalement, quand je prends du cannabis médical, je n’ai pas le droit de conduire. Mais je suis obligé de conduire pour me rendre à mon travail. Ce n’est pas simple”. L’informaticien déplore également que certaines pharmacies aient eu certaines réticences pour délivrer le cannabis thérapeutique. Il a mis du temps pour trouver une pharmacie agréée.

Un traitement encadré

Pour le moment, l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé) a retenu cinq indications thérapeutiques pour cette expérimentation : 

  •  certaines formes d’épilepsie sévères et pharmaco-résistantes
  • certains symptômes rebelles en oncologie
  • douleurs neuropathiques réfractaires aux thérapeutiques accessibles
  • situations palliatives
  • spasticité douloureuses des pathologies du système nerveux central. 

De nouvelles avancées 

Depuis la fin mars, après une période d’incertitude sur la poursuite de l’expérimentation, le gouvernement a franchi une étape capitale. Vincent est le patient du Pr Nicolas Authier, médecin psychiatre au CHU de Clermont-Ferrand, président du comité scientifique sur le cannabis médical. Ce dernier se réjouit des dernières avancées : “La démarche a été reprise par le gouvernement actuel, après six mois de statu quo. Il a décidé de poursuivre la démarche car il a prolongé les patients déjà traités jusqu’à fin mars 2026. On a un an de plus mais on ne peut pas inclure de nouveaux patients. C’est un premier soulagement. Il n’y a plus d’injonction à arrêter les traitements. Le gouvernement a aussi relancé les démarches réglementaires, en notifiant à la Commission européenne un projet de décret et d’arrêté, pour appliquer la loi de décembre 2023, qui autorise la France à donner accès à ces médicaments. Les pays européens ont trois mois pour faire un retour. Ensuite, ces décrets doivent être publiés au Conseil d’Etat, ce qui prendra un certain temps”.  

Vers une autorisation en 2026 ?

En parallèle de cela, une saisine de la HAS, Haute autorité de santé, a été effectuée par le ministre de la Santé. Des questions de remboursement des médicaments sont ainsi évoquées. L’autorisation d’accès au cannabis médical est en bonne voie, selon le Pr Nicolas Authier : “Quand le décret sera publié par le Conseil d’Etat, l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé) pourra alors donner les premières autorisations de mise sur le marché de ces médicaments. Enfin se posera la question du prix de ces médicaments et du remboursement. La question ne sera pas réglée au mieux avant l’été 2026”. Le psychiatre évoque le soulagement des patients qui peuvent poursuivre leur traitement : “Les patients étaient très inquiets car ils sont traités depuis au moins un an, voire certains trois ans. S’ils gardent ce traitement, c’est qu’ils en gardent un bénéfice. Cette stratégie thérapeutique arrive en dernière intention, pour des patients chez qui la souffrance est réfractaire aux autres thérapeutiques. Ce sont des patients en impasse thérapeutique. Si on leur arrête le cannabis médical, qui fonctionne pour eux, il n’y a pas d’alternative”.

3200 patients traités

L’expérimentation du cannabis médical a démarré en 2021 dans l’Hexagone. Le Pr Nicolas Authier en tire un premier bilan : “En France, on sait prescrire des médicaments. Les pharmaciens savent dispenser les médicaments. On a montré que pour 30 à 40 % des patients qui étaient en impasse thérapeutique, on a pu leur proposer une alternative efficace. Leur souffrance a significativement diminué et leur qualité de vie a été améliorée. On a aussi évalué d’assez près la sécurité d’emploi de ces médicaments, avec les effets indésirables. Ce bilan, sur plus de 3 200 patients, est rassurant, avec un pourcentage d’effets indésirables graves qui est faible, autour de 5 %. En général, ces effets indésirables étaient plutôt connus : ils sont neurologiques, cardiovasculaires ou psychiatriques mais réversibles et liés à une augmentation de posologie trop rapide lors de l’instauration du traitement”. Dans les indications actuelles, on peut estimer entre 150 000 et 300 000 le nombre de patients qui pourraient être concernés en France par le recours au cannabis médical. 

Source: https://france3-regions.franceinfo.fr/

Publié le 24/05/2025

Auteur: Principes Actifs 1

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