Une étude internationale démontre les effets neuroprotecteurs du phytocannabinoïde THCA

PHYTOCANNABINOÏDE THCA

La liste des maladies pour lesquelles les phytocannabinoïdes contenus dans la plante de cannabis offrent des bienfaits et des propriétés thérapeutiques ne cesse de s’allonger. Une étude internationale vient de démontrer que l’acide tétrahydrocannabinolique, le THCA que contient le cannabis cru présente d’importants effets neuroprotecteurs.

 

Les phytocannabinoïdes, principes actifs contenus dans la plante de Cannabis Sativa L., déterminent la portée de leurs propriétés et de leurs bienfaits thérapeutiques. Chaque jour, la liste des maladies et des troubles pour lesquels les cannabinoïdes s’avèrent bénéfiques ne cesse de s’allonger alors que la recherche avance. L’attention se porte à présent sur l’acide tétrahydrocannabinolique (THCA), un phytocannabinoïde sous forme d’acide trouvé dans le cannabis cru. Une équipe internationale de chercheurs vient de publier une étude qui démontre que le THCA possède d’importantes propriétés neuroprotectrices, ce qui veut dire qu’il représente un traitement potentiel et prometteur pour les maladies du métabolisme et les maladies inflammatoires et dégénératives du cerveau.

Afin de mieux comprendre la portée de l’étude en question, j’aimerais d’abord présenter brièvement les concepts de base qui se rattachent à la science des cannabinoïdes avec lesquels certains sont déjà familiers, et d’autres moins.

Que sont les phytocannabinoïdes ?

En général, on utilise le terme « cannabinoïdes » pour désigner toutes les substances chimiques qui, indépendamment de leurs origine et structure, se lient à notre propre système endocannabinoïde, plus précisément aux récepteurs cannabinoïdes retrouvés dans le corps et le cerveau.

Toutes ces substances chimiques forment un groupe, large et diversifié, que l’on peut diviser en trois sous-groupes :

  • les cannabinoïdes végétaux ou phytocannabinoïdes synthétisés naturellement par la plante de cannabis ;
  • les cannabinoïdes endogènes ou endocannabinoïdes produits par les organismes des animaux et le corps des humains, par exemple, l’ ou le 2-AG;
  • et les cannabinoïdes de synthèse qui comme leur nom l’indique, sont produits synthétiquement en laboratoire.
    Les endocannabinoïdes font partie d’un système de modulation de notre organisme et comprennent les récepteurs sur lesquels agissent les cannabinoïdes végétaux, ou phytocannabinoïdes. Lorsqu’on fume, mange ou vaporise du cannabis, ces phytocannabinoïdes interagissent avec les cellules de notre corps ce qui produit des effets thérapeutiques.

A l’heure actuelle, on a découvert plus de 100 phytocannabinoïdes – des formes acides ou neutres, des analogues et d’autres produits de transformation. Parmi les cannabinoïdes les plus connus et étudiés retrouvés dans le cannabis, le haschich ou d’autres préparations à base ou dérivées de la plante de Cannabis Sativa L., notons le tétrahydrocannabinol (THC), le cannabidiol (CBD) et le cannabinol (CBN) ainsi que d’autres moins connus tels le cannabichromène (CBC), le cannabigérol (CBG), le cannabicyclol (CBL), la cannabidivarine (CBDV) et bien d’autres encore.

L’essor de la recherche sur les cannabinoïdes est alimenté par leurs potentielles applications thérapeutiques médicales. Ces substances sont manifestement un thème d’intérêt mondial qui surpasse les domaines strictement scientifique et médical.

THCA, acide de cannabinoïde sans effet psychoactif

L’acide tétrahydrocannabinolique (THCA) est un composé, la forme acide d’un cannabinoïde qui se retrouve dans le cannabis cru avant que se produise la « décarboxylation ». Cette réaction connue survient sous l’effet de la chaleur ou lorsque le cannabis est séché et grâce à elle, les acides se transforment en composés neutres et psychoactifs. En d’autres mots, c’est le processus chimique qui déclenche le caractère psychoactif du cannabis. Ainsi, les acides des cannabinoïdes sont dépourvus d’effets psychoactifs, ce qui les rend attrayants pour la science.

Plus précisément, le THCA se convertit en Δ9-THC – le célèbre et principal composé psychoactif de la plante – sous l’action de la combustion, de la vaporisation ou d’un chauffage à une température adéquate. Il est donc impossible de fumer ou d’inhaler les acides des cannabinoïdes ; ils ne peuvent être qu’ingérés ou appliqués localement.

Propriétés neuroprotectrices des cannabinoïdes

Tournons notre attention sur l’étude en question, cette étude qui prouve une fois de plus la validité de l’intérêt scientifique pour le cannabis médical et les propriétés thérapeutiques de ses composés – particulièrement des composés non psychoactifs tel le CBD.

La recherche médicale a été conduite à l’Instituto Maimónides de Investigación Biomédica de Córdoba, en Espagne, en collaboration avec trois importantes entreprises actives dans la recherche sur le cannabis médical – Phytoplant Research SL, VivaCell Biotechnology Spain SL et Emerald Health Pharmaceuticals. L’étude a été publiée dans le British Journal of Pharmacology.

Les chercheurs ont constaté que l’acide tétrahydrocannabinolique (THCA) présentait un grand potentiel neuroprotecteur et à ce titre, représentait un traitement prometteur pour les maladies inflammatoires et dégénératives du cerveau tels la sclérose en plaques (SP), l’Alzheimer et le Parkinson, entre autres.

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), chaque année environ 6,8 millions de personnes meurent des suites de ces maladies neurodégénératives, la majorité affectant les fonctions cognitives et d’autres fonctions de l’organisme tels l’équilibre, le mouvement, le langage, ou encore, la respiration et les battements du cœur.

L’étude a démontré que le THCA, le phytocannabinoïde non psychoactif biosynthétisé en grande abondance par la plante de Cannabis sativa L. exerce de tels effets dans sa forme crue en activant les récepteurs PPARγ – au lieu d’agir sur le système endocannabinoïde – ce qui élimine les effets psychoactifs au niveau cérébral qui ne sont pas désirables dans une perspective médicale.

Comme l’a affirmé le Dr Xavier Nadal, directeur du département d’extraction de I+D de l’entreprise Phytoplant Research SL., « cette découverte ouvrira de nouvelles possibilités d’applications neuroprotectrices des cannabinoïdes tout en évitant les effets secondaires psychoactifs ».

Résultats de l’étude in vivo

Les chercheurs ont utilisé des animaux comme modèles, des rongeurs, afin d’étudier la bioactivité du THCA – qui pour l’instant demeure peu étudié par la science bien qu’il se retrouve déjà dans différentes préparations à base de cannabis – mais également pour déterminer si le Δ9- THCA module l’activité des récepteurs PPARγ et vérifier son activité neuroprotectrice in vivo.

Les résultats ont démontré que les acides de cannabinoïdes se liaient aux récepteurs PPARγ et les activaient plus efficacement que leurs produits décarboxylés. Certains cannabinoïdes se lient aux récepteurs nucléaires PPARγ, et la signalisation de la voie PPARγ joue un rôle dans la neuroinflammation et l’épilepsie. Comme Δ9- THCA est un puissant agoniste des récepteurs PPARγ, il a exercé une activité neuroprotectrice et neuroinflammatoire dans les modèles animaux affectés de la maladie de Huntington. Chez les rongeurs ayant été inoculés avec de l’acide 3-nitropropionique, une toxine mitochondriale, le THCA a amélioré les déficits moteurs en plus de prévenir la dégénérescence du striatum par l’intermédiaire d’une voie dépendante des PPARγ.

D’autre part, l’acide tétrahydrocannabinolique a provoqué une augmentation de la masse mitochondriale des cellules N2a du neuroblastome, prévenant ainsi la cytotoxicité induite par la privation de sérum dans les cellules STHdhQ111/Q111. Finalement, les chercheurs ont aussi démontré que l’acide tétrahydrocannabinolique atténuait la microgliose et l’astrogliose, en plus de réduire l’expression des médiateurs de l’inflammation et les marqueurs normalement associés à la maladie d’Huntington.

Conclusion

L’équipe de chercheurs a conclu que le Δ9- THCA présentait une importante activité neuroprotectrice digne d’intérêt dans le traitement de la maladie de Huntington, et possiblement d’autres maladies neuroinflammatoires et neurodégénératives. En outre, ils ont conclu que les préparations végétales de cannabis médical non décarboxylé pourraient contenir de fortes concentrations d’autres acides de cannabinoïdes non psychoactifs, comme l’acide cannabidiolique (CBDA) et l’acide cannabigérolique (CBGA), ces deux molécules agissant aussi sur les récepteurs PPARγ.

L’intérêt et la pertinence de ce type d’étude résident dans le fait qu’elle fournit des preuves que ces cannabinoïdes contenus dans la plante de Cannabis Sativa L. recèlent un potentiel pharmaceutique remarquable. Bien que pour l’instant, plusieurs de ces études demeurent en phase préclinique, c’est-à-dire qu’elles n’ont pas été effectuées sur des humains, les résultats démontrent sans l’ombre d’un doute le potentiel du cannabique médical comme traitement alternatif et/ou complémentaire qui pourrait aider bien des patients affectés de maladies et de troubles partout dans le monde.

Pourtant, nous ne pouvons oublier que contrairement au CBD qui est extrait du chanvre, le THCA provient du cannabis qui malheureusement, demeure illégal à bien des endroits dans le monde. C’est pour cette raison que bon nombre d’études et de travaux de recherche sur les cannabinoïdes ne peuvent toujours pas prendre d’humains comme sujets, la législation actuelle interdisant le cannabis et le classifiant encore comme une plante dépourvue de valeur médicinale. Tant et aussi longtemps que les lois ne changent pas, la science continuera à se buter à un mur.

 

Source : sensiseeds blog

Auteur: Philippe Sérié

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